Chargement

ActualitésActualitésActualités

Rumeurs sur Manhattan

Publié le 1 juin 2022

Dans la rumeur de Manhattan, on est jamais sûr de ce qu’on va entendre à travers le bruit. Tant qu’on n’a pas identifié la source, le mystère acousmatique fait travailler l’imagination, provoquant même parfois de merveilleux « effets Sharawadji » ! Comme dans tout voyage, le plus intéressant n’est ni le son de départ ni celui d’arrivée, mais toute l’instabilité d’un état à l’autre.
Ces audio-croquis de voyage ont été saisis sur un modeste Zoom H2n (mode surround), sans (presque) aucun traitement ni montage.

Jour 1 – Chambre avec ouïe
Petit matin du premier jour, chambre 1403 de l’hôtel Hyatt – Chelsea, NYC. Par la fenêtre retenue par une solide chaîne qui permet tout juste de l’entrebâiller, j’essaye de capter l’ambiance de l’aube qui monte de la ruelle. J’ai peur de laisser tomber mon enregistreur 14 étages plus bas. 

Jour 2 : Little Island
Sur la rive un joueur de Hang, ce délicat instrument apparu dans les rues au XXIeme siècle. Mais voilà qu’à l’autre bout du ponton d’autres notes cristallines lui répondent, bientôt majestueusement soutenues par la basse profonde d’un hélicoptère ; c’est un très joli carillon, qu’on actionne en marchant ou en dansant sur des plaques à l’entrée de Little Island.

Jour 3 : NY Ice Cream

La traditionnelle boîte à musique mécanique amplifiée  la présence du marchand de glaces dans de très nombreux pays. Ici la ritournelle est spécifique aux camionnettes roses de « New York Ice Cream ». Après quelques répétitions de cette mécanique nostalgique et fatiguée sur fond de groupe électrogène, un policeman semble siffler la fin de la partie.

Jour 4 : Ragga Jesus
En marchant vers Herald Square, dans le bruit de fond l’on discerne des bribes de voix humaine très distordues par un ampli minuscule. En se rapprochant, on comprend qu’on a affaire à une évangéliste, mais on découvre aussi, quelques mètres plus loin, un autre personnage, impassible, avec un autre ampli qu’on n’avait pas remarqué et qui diffuse du raggamuffin. Difficile de savoir s’il sont ensemble ou s’ils s’ignorent ; si l’évangéliste se sert de l’autre comme bande orchestre ou si insensiblement elle en subit l’attraction et se cale sur la pulsation et la tonalité…

Jour 5 : Le Lance-Notes
Jon Noël est un tromboniste de rue qui danse avec son instrument un peu comme un bazooka. Il tire sur les surfaces des murs et des véhicules qui passent, le son explose dans toutes les directions. Un chien l’invective, les klaxons lui répondent comme des riffs de cuivres.

Jour 6 : The Mysterious Horse Ragtime
Central Park. Encore un petit Sharawadji. Comme apporté par le vent, on ne sait d’où ça venait (du ciel, donc ?) ni exactement ce que c’était, ni ce que ça jouait. Comme si ça entendait le pas du cheval, ça s’est mis peu à peu à danser, un sorte de ragtime.

Jour 7 : Over the Rainbow – Under the Bridge
Central Park. Avant d’entrer sous le pont, c’était un thème mille fois rebattu. Puis tout change à l’intérieur, et lorsque l’on sort à l’air libre c’est fini, comme si tout ça n’était arrivé que pour nous. Décidément il ne faut jamais s’arrêter. Tout arrive quand il y a du mouvement.

Jour 8 : BigBen Mitzvah
Une copie du londonien Big Ben traverse confusément l’épaisseur du bruit de la rue. On ne localisera jamais ce clocher invisible. Mais dans sa résonance, nos oreilles tendues perçoivent alors un chant, parfaitement accordé dans la même tonalité. Et voilà, c’est là, dans le bus Mitzvah Tank. « No pictures please! ». Trop tard, Shalom…

Jour 9 : Irish Hunger Monument
Au cours de mes repérages j’avais remarqué cette fausse ruine commémorant la grande famine irlandaise, avec son couloir très réverbérant, un auvent protecteur et réfléchissant, et un portail coulissant, merveilleusement grinçant et mélodique ! Depuis la matinée, avec Leese, Rolf, Bry, Crystal-Marie et Rob de Strike Anywhere, nous improvisions avec les déjà-là et l’environnement. Ceci est un extrait d’une série de tentatives d’effets Sharawadji ; la flûte de Rolf s’enlace avec le portail et les voix, la trompette de Rob introduit comme une prémonition l’entrée des hélicoptères.

Jour 10 : La harpe de l’embarcadère
Le temps est à la pluie pour la toute dernière séance expérimentale de « jardinages acoustiques » avec Strike Anywhere. Dans les ronronnements habituels des hélicoptères et des ferries, je suis attiré par les grincements mélodiques de la gare maritime de Brookfield-Battery Park. Cet embarcadère flottant abrite des guichets mais aussi une nichée d’oiseaux siffleurs, et fera un bon auditorium couvert où vont se mixer les voix des passagers et des haut-parleurs, celles de Leese et Crystal-Marie, la flûte de Rolf, l’harmonica, les beeps électroniques de Renaud et les oiseaux, les basses profondes des ferries, les hélicoptères et l’archet frotté sur les câbles tendus de cette harpe-embarcadère.

Télécharger

Vous cherchez

Quelque chose en particulier ?